Voeux aux collaborateurs parlementaires

Mesdames et Messieurs les Questeurs,

Monsieur le Secrétaire général de la Présidence,

Monsieur le Secrétaire général de la Questure,

Mesdames et Messieurs les Présidents et Secrétaires généraux des associations et syndicats de collaborateurs,

Mesdames et Messieurs les collaboratrices et collaborateurs,

 

Je suis très heureux de vous accueillir aujourd’hui pour cette cérémonie de vœux qu’on appelle traditionnellement « la galette des collaborateurs ». J’ai souhaité vous recevoir ici parce que vous faites pleinement partie de l’institution parlementaire.

Depuis que j’ai été élu à la présidence de l’Assemblée nationale, c’est la première fois que j’ai l’occasion de m’adresser à vous directement, et je le fais avec un plaisir tout particulier.

Je crois que c’est aussi la première fois où un président de l’Assemblée nationale est aussi un ancien collaborateur parlementaire. Certains d’entre vous le savent, ce fut en effet mon premier métier, puisque j’ai débuté ma vie professionnelle comme secrétaire général adjoint du « groupe RCV », un groupe technique qui rassemblait alors des députés écologistes, radicaux et divers gauche.

C’était il y a longtemps, près de vingt ans : autrement dit, une éternité. En ce temps-là, figurez-vous qu’il nous arrivait fréquemment, à nous collaborateurs, de rédiger les amendements à la main, puis de venir les déposer individuellement au service de la séance, voire au plateau. C’est déjà de l’Histoire. 

Depuis, comme ce sera sans doute le cas pour certains d’entre vous, j’ai été élu local, puis les élections législatives de 2007 ont fait de moi un député, autrement dit un employeur de collaborateurs parlementaires.

De cette double expérience, de collaborateur puis d’employeur, je tire tout à la fois la connaissance, l’estime et le respect que je porte à votre fonction.

Je  le dis sans aucune démagogie : je sais tout ce que notre Assemblée doit à la qualité des collaborateurs qui y travaillent. C’est d’autant plus vrai sous cette législature, marquée par un profond renouvellement politique et générationnel : les nouveaux députés avaient besoin de vous, de votre dévouement, de votre expertise, pour prendre leurs marques et pouvoir jouer pleinement leur rôle. Vous avez dynamisé la rentrée parlementaire et je vous en remercie.

L’Assemblée est une communauté humaine composée de 577 députés, 1300 fonctionnaires et 2000 collaborateurs.

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Or, malgré cela, un constat s’impose : votre métier est souvent mal connu, mal compris, mal défini. Et pour cause : peu d’activités requièrent une telle polyvalence.

Vous êtes à la fois généralistes et spécialistes, juristes et communicants, tranchants à l’écrit et à l’aise dans le contact humain, discrets mais toujours disponibles, à l’écoute de votre député et force de propositions, au fait des rapports de force politiques et au plus près des citoyens.  

Vous êtes à la manœuvre sur toutes les tâches qui façonnent la vie parlementaire :

-         vous organisez le temps des députés,

-         vous transformez une idée politique en proposition de loi,

-         vous donnez corps au travail législatif à travers les amendements que vous rédigez,

-         vous écrivez les discours,

-         alimentez les réseaux sociaux,

-         animez les réseaux militants,

-         tout en prenant le pouls de la circonscription.

Certains vous définissent comme des « couteaux suisses », je préfère dire que vous êtes les chevilles ouvrières de notre institution.

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Ces vérités, il me revient de les faire entendre, en tant que président de l’Assemblée nationale. Car, ces derniers mois, votre profession a été malmenée.

Les scandales qui ont émaillé la dernière élection présidentielle ont donné lieu à d’insupportables caricatures, laissant penser que vous n’exerciez pas effectivement votre profession, ou perceviez des rémunérations indécentes.

Je sais qu’il n’en est rien ! Je l’ai dit à l’époque, je le redis chaque fois que c’est nécessaire. Les collaborateurs parlementaires sont des gens consciencieux. Ils travaillent d’arrache-pied pour une rétribution modeste. Ils ont le droit d’être protégés et valorisés, dans une fonction délicate que les aléas électoraux condamnent à une certaine précarité.

Les députés, je le sais, sont très attachés à la revalorisation de votre métier, tant le lien qui unit le collaborateur au parlementaire est singulier. Fondé sur une relation unique, faite de confiance et de proximité, ce lien essentiel doit être préservé. C’est pourquoi nous, les députés, devons veiller à ce que nos collaborateurs bénéficient non seulement de conditions de travail correctes, mais aussi de perspectives de carrière qui leur permettent de s’épanouir dans leurs fonctions, de les exercer pleinement dans la plus grande sécurité possible.

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Vous le savez, j’ai placé mon mandat sous le signe de la transformation et de la modernisation de l’Assemblée nationale. Dans cet esprit, j’ai souhaité que la question du statut des collaborateurs fasse l’objet d’un groupe de travail spécifique et soit traitée en priorité.

Nous ne partions pas de rien, heureusement. Je veux rappeler que, sous la précédente législature, il y a eu des avancées majeures. Sous l’impulsion de mon prédécesseur, Claude Bartolone, une dynamique a été engagée notamment avec la création de « l’Association des députés employeurs » qui a posé les conditions d’un véritable dialogue social.

Il faut aussi saluer le courage et la détermination de Marie-Françoise Clergeau, ancienne questeure : elle a conduit les négociations qui ont abouti à la conclusion du premier accord collectif avec les collaborateurs de député.

C’est un engagement concret et fort de l’Assemblée. Par exemple, les indemnités de fin de contrat pour les collaborateurs de groupes ou de députés prises en charge directement par l’Assemblée nationale représentent un engagement de 35M€ pour l’Assemblée nationale.

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Depuis six mois, des mesures importantes ont déjà été prises :

  • la loi débattue en juillet et août 2017, pour la confiance dans la vie publique consacre le dialogue social entre les représentants des députés employeurs et ceux des collaborateurs. Elle interdit les emplois familiaux, contribuant ainsi à lever toute suspicion. Elle prend en compte la situation spécifique de fin de contrat en prévoyant une nouvelle procédure de licenciement qui s’apparente, dans ses effets,  au licenciement économique.
  • Des mesures d’information sur les situations de harcèlement ont également été mises en œuvre : une référente « harcèlement » a été désignée, des affichettes rappellent que le harcèlement est un délit pénal et des actions de sensibilisation ont été menées.

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Néanmoins, il nous fallait aller plus loin. La feuille de route confiée au groupe de travail était claire : analyser l’existant, entendre l’ensemble des acteurs, identifier les besoins et faire des propositions pragmatiques et réalistes, afin de développer le dialogue social et de faire progresser votre situation. C’est la première fois, dans l’histoire de notre assemblée, que la situation des collaborateurs fait l’objet d’une réflexion d’ensemble, à l’initiative des autorités politiques.

Je dois remercier, ici, le Président et la Rapporteure du groupe de travail : Michel Larive et Jacqueline Maquet, ainsi que l’ensemble de ses membres, pour le travail qu’ils ont accompli.

Je crois sincèrement que leur écoute, la manière dont ils ont su appréhender l’ensemble des problématiques liées, leur volonté de s’extraire des visions partisanes pour élaborer des propositions consensuelles, vont permettre de construire un véritable cadre d’exercice des fonctions de collaborateurs.

Sur ma proposition, le Bureau a examiné ce matin plusieurs  propositions issues du groupe de travail.

Certaines, d’effet presque immédiat, étaient très attendues :

  • Je commencerai, bien sûr, par l’augmentation de 10 % du crédit collaborateur. C’était une nécessité. Il s’agit d’une hausse importante, historique même. Mais je souhaite être transparent avec vous : elle représente aussi un effort de 10 millions d’euros par an pour l’Assemblée, dans un contexte budgétaire contraint, qui va clairement nous amener à puiser dans les réserves. Il nous faudra, à terme, trouver des modalités de financement pérennes.
  • Ensuite, le bureau a acté l’obligation d’adhérer à l’Association des députés employeurs pour pouvoir bénéficier de la gestion déléguée. Cette mesure était indispensable, car seuls les collaborateurs dont les députés sont adhérents pourront bénéficier des mesures issues des accords collectifs. Il est donc impératif que le plus grand nombre de députés soient dans cette situation. Aujourd’hui, c’est le cas pour 87 % d’entre eux et tout sera mis en œuvre pour informer, convaincre, et lever les dernières réticences.
  • Un certain nombre de mesures d’organisation ont également été approuvées :
    • la désignation d’un référent « formation »,
    • la systématisation de l’entretien biennal d’évaluation sur l’évolution professionnelle et la formation,
    • la sensibilisation des députés à l’adhésion obligatoire à un service de santé au travail. Sur ce dernier point je voudrais rappeler qu’il est certes indispensable que l’ensemble des députés adhère à un service de santé, mais qu’il faut aussi que les collaborateurs aillent aux rendez-vous !
  • La question de la déontologie sera également traitée : sur proposition de la déontologue, une concertation sera menée pour établir une charte de la déontologie des collaborateurs. C’est une question importante. Je tiens à préciser qu’il ne s’agit pas de limiter votre liberté d’expression ou votre autonomie, mais de fixer un cadre clair et protecteur, qui sera repris dans le contrat de travail, complétera les éléments déjà existants et vous permettra d’exercer vos fonctions en toute sécurité.
  • Certaines propositions nécessitent des études complémentaires, notamment en termes d’impact financier. C’est d’ailleurs ce que préconisait le groupe de travail. Je pense à la portabilité de l’ancienneté et, pour les collaborateurs de circonscription, à la prise en charge des indemnités kilométriques relatives aux trajets domicile-travail. Je veillerai à ce que ces travaux soient réalisés dans les meilleurs délais, car je sais l’importance que vous  accordez à ces sujets.
  • Je n’oublie pas la question de l’égalité femmes/hommes, qu’il s’agisse de l’égalité salariale ou, plus généralement, de la lutte contre le sexisme. Vous êtes aujourd’hui 981 collaboratrices et 914 collaborateurs. Nous approchons donc d’une parité parfaite. Je note, d’ailleurs, que les hommes sont significativement plus nombreux que sous la précédente législature, puisqu’ils n’étaient que 812 : c’est cela aussi, la parité.

J’ai demandé au groupe de travail dédié aux collaborateurs de consacrer une prochaine feuille de route à ce sujet. Je souhaite qu’il soit traité dans un cadre global, intégrant l’ensemble des acteurs et des personnels de l’Assemblée nationale. Il y a là une attente forte et nous serons au rendez-vous.

 

  • Enfin, un certain nombre de mesures entrent dans le cadre du dialogue social et relèvent de la négociation collective, à laquelle je suis très attaché :
    • l’élaboration de fiches métiers,
    •  la réflexion sur le décompte du temps de travail,
    • les références salariales,
    • le télétravail,
    • la formation professionnelle.

Je voudrais dire, à ce propos, toute l’importance que j’accorde à la formation. Les propositions du rapport lui consacrent une part importante. Elle doit permettre, au-delà de l’adaptation au métier, de construire l’avenir, votre avenir, de sécuriser votre parcours professionnel et de valoriser votre expérience. La négociation devra tout particulièrement prendre en compte la situation des collaborateurs de circonscription qui, à cause de leur éloignement géographique, n’ont pas facilement accès à l’offre de formation.

Sur tous ces sujets, je sais qu’il y a des attentes, parfois des inquiétudes. Elles sont légitimes. Et c’est tout l’intérêt de les renvoyer à la négociation : chacun pourra exprimer ses craintes et ses besoins, afin de construire collectivement les formules les plus adaptées.

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Une nouvelle page est en train de s’écrire. Ce travail que j’ai souhaité, les décisions prises aujourd’hui, constituent un tournant, pour la définition du métier de collaborateur et pour vos conditions de travail.

Vous pouvez compter sur ma détermination pour que ces chantiers aboutissent. J’y veillerai personnellement, tout au long de leur réalisation.

Vous le voyez, nous démarrons sous de bons auspices et je vous souhaite, à toutes et à tous, une très belle année 2018, pleine de réussites individuelles et de progrès collectifs.